Sarkozy, Tchernobyl et la désinformation

Si cette nouvelle est confirmée, elle est absolument stupéfiante : Nicolas Sarkozy aurait été responsable des risques chimiques et radiologiques au ministère de l’intérieur en 1987, et à ce titre aurait été en charge du traitement des effets de Tchernobyl sur la population française.

Dans la mesure où les grands médias qui en auraient le moyen n’ont pas encore trouvé le temps ou le courage de nous informer sur ce sujet, et dans la mesure aussi où le « buzz » internet sur cette question doit être pris avec précaution, nous essayons ici de faire le tri entre certain et possible.

 

D’abord : l’histoire de la « révélation ».

Le 26 avril 2006, le réseau « Sortir du nucléaire » interpelle Nicolas Sarkozy sur son rôle au ministère de l’intérieur, à l’époque de Tchernobyl.

La consultation de la biographie de l’Express confirmera aux curieux que le futur candidat était bien, comme « Sortir du nucléaire » l’affirme, « chargé de mission pour la lutte contre les risques chimiques et radiologiques » au ministère de l’intérieur, dirigé à l’époque par Charles Pasqua.

La notice de l’Express, dérivée apparemment de celle du Who’s who ?, précise que Sarkozy a occupé ces fonctions en 1987, sans que, curieusement les dates de début ni de fin ne soient précisées.

Le titre ne permet pas de savoir si Sarkozy est chargé de mission au cabinet de Pasqua, ou (à un niveau moins élevé) dans l’administration du ministère.

A cette date, il n’est plus tout à fait un jeune homme : il a trente deux ans et cumule déjà les fonctions de maire de Neuilly, vice-président du conseil général des Hauts de Seine, et conseiller régional.

La notice de l’Express semble fiable. Certes la référence à ces fonctions ne figure pas dans la biographie officielle de Sarkozy des archives web du ministère de l’intérieur, ni sur les sites complaisants de pseudo information biographique, sans parler de l’hagiographie ultra professionnelle de Catherine Nay. Mais on en retrouve de nombreuses traces, y compris sur des sites ou d’autres sources favorables à Nicolas Sarkozy : nous donnons comme exemple les archives du ministère des finances.

Mais l’explosion de Tchernobyl ayant eu lien fin avril 1986 et Sarkozy étant en charge du dossier en 1987, son rôle exact reste à définir.

A priori, c’est le bon ministère (la sécurité civile relève de l’intérieur), et le bon titre (risques chimiques et radiologiques). Cependant la qualité de « chargé de mission » n’est pas celle d’un décisionnaire ministériel, même si, compte tenu de ses responsabilités politiques et de sa proximité avec le ministre, on peut présumer que Sarkozy ne s’est pas contenté de faire des notes.

En tout état de cause, le contenu de son intervention est inconnu. On sait cependant que le gouvernement est engagé à l’époque dans une grande entreprise de désinformation : si, a priori, Sarkozy n’a rien à voir avec la propagande ridicule sur les nuages radioactifs miraculeusement arrêtés à la frontière, il est en charge du dossier au moment où le gouvernement Balladur entreprend de minorer systématiquement les effets de Tchernobyl sur les populations françaises.

La demande de « Sortir du nucléaire » semble donc légitime et adaptée. Pourtant elle reste sans réponse et les grands médias se gardent bien de reprendre l’information ni la question.

Trouble sur internet

Dans les dernières semaines, un mail circule abondamment : c’est une sorte de portrait chinois qui invite à reconnaître Sarkozy. Nous ne reprenons pas le texte de ce mail qui nous semble trop approximatif. Il existe d’ailleurs dans plusieurs versions, dont une pratique (sur un autre sujet que Tchernobyl) un type d’insinuation ou d’amalgame déplaisant. La rumeur gonfle et s’amplifie sur les blogs.

Par exemple, Claude-Marie Vadrot fait rebondir l’information en donnant à Sarkozy le titre de « Délégué interministériel pour les énergies et le nucléaire » et en affirmant « C’est lui qui a orchestré, en coulisses, le célèbre arrêt du nuage de Tchernobyl aux portes de la France ». On ne trouve pas de sources, ni de traces de ce « délégué interministériel » ; cette imputation est probablement fausse. Et Sarkozy n’était pas en fonctions quand le nuage s’est arrêté.

Le 28 mars, le Nouvel Observateur met en ligne sur son site internet, dans la rubrique « humour », le mail qui continue à circuler. Le site de José Bové reprend l’information. Pour le moment, à notre connaissance, ni la presse écrite, ni les médias audiovisuels n’ont repris le sujet.

Il est pourtant important et même fondamental.

Il ne s’agit pas ici d’informations sur la vie privée ni de critiques sur la personne mais de responsabilité publique sur un événement absolument majeur.

La mission précise, le rôle effectif, et le contenu des positions prises par le candidat font partie des informations auxquelles ont droit les électeurs dans toute démocratie.

L’actuel black-out et la désinformation sont en soi révélateurs.

Voir communiqué de presse du 26 avril 2006 de “Sortir du nucléaire”

Notice de l’Express

Article de Vadrot

Archives du ministère des finances


Source : 30/03/2007
http://culturecritique.wordpress.com/2007/03/30/sarkozy-tchernobyl-et-la-desinformation/

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