Des EPR2 au Bugey

En novembre 2018, le directeur du site nucléaire du Bugey n’a pas voulu dire pour quel projet EDF prospectait pour acheter 336 ha à proximité du site actuel.
Il le savait très probablement car en décembre 2019, le Conseil Départemental de l’Ain et la Communauté de Communes de la Plaine de l’Ain ont pris un vœu pour la candidature du site du Bugey pour l’accueil d’une paire d’EPR2.
La commune de Loyettes a pris un vœu similaire le 5 mars 2020.

Sommaire (permet, d’un clic, de se rendre directement sur le chapitre voulu) :
   Urbanisme
   • Les EPR2 au Bugey
   • Le site désiré par EDF
   • Le refroidissement des EPR2
   • Modélisations des futurs EPR2
   • Réacteurs EPR2 : peu de carbone mais des pollutions et des déchets

Urbanisme

Le syndicat BUCOPA qui gère le Schéma de COhérence Territorial (SCOT) de 4 communautés de communes de l’est lyonnais, dont celle de la Plaine de l’Ain, prépare le venue des EPR2 en modifiant le SCOT en cours pour transformer les terres agricoles proches du site nucléaire actuel en zone aménageable :

  • Conseil syndical du 26 janvier 2021 : délibération pour le recrutement d’un bureau d’études pour une mission d’accompagnement dans le choix de la procédure d’évolution du SCOT éventuellement nécessaire à l’extension de l’emprise foncière du CNPE du Bugey dans le cadre de ses projets de développement ;
  • Conseil syndical du 16 mars 2021 : séance exclusivement consacrée aux projets d’EDF sur le site du CNPE Bugey avec un exposé d’EDF sur le projet d’EPR2 ;
  • Conseil syndical du 22 juin 2021 :
    – décision de lancer une procédure de modification n°1 de son SCOT,
    – définition des modalités de concertation publique ;
  • Concertation publique du 26 novembre 2021 au 26 février 2022 ;
  • Enquête publique du 20 septembre 2022 au 22 octobre 2022 ;
  • Approbation de la modification n°1, le 6 février 2023.

Remarque 1 : La présentation d’EDF n’est pas jointe au compte-rendu du conseil syndical du 16 mars 2021.
Sortir Du Nucléaire Bugey la réclame, mais ne l’obtient pas.
Au final, la Commission d’Accès aux Documents Administratifs est saisie et donne un avis favorable à la demande, mais ni le BUCOPA, ni EDF ne la communiquent. Le secret règne !

Remarque 2 : Sortir Du Nucléaire Bugey a demandé au Tribunal Administratif de Lyon l’annulation de la délibération du 6 février 2023 approuvant la modification du SCOT. Dans l’attente de la date d’audience.

Parallèlement à cette modification du SCOT, la commune de Loyettes a lancé la révision de son PLU par délibération du 9 décembre 2021.
Une enquête publique a eu lieu du 18 mars 2024 au 18 avril 2024.
Le PLU révisé a été acté par la délibération du 19 septembre 2024.

Remarque 3 : Sortir Du Nucléaire Bugey a demandé au Tribunal Administratif de Lyon l’annulation de la délibération du 19 septembre 2024 approuvant la révision du PLU. Procédure en cours (Septembre 2025).

Les EPR2 au Bugey

La confirmation du choix du site de Bugey pour la 3ème paire d’EPR2 plutôt que celui de Tricastin a été faite lors du Conseil de politique nucléaire réuni à l’Élysée le 19 juillet 2023.
Pour la majorité des élus locaux et le milieu économique ce fut une grande joie centrée uniquement sur les retombées économiques et l’emploi.

Du côté de l’emploi, ce ne sera que très passager puisqu’il est attendu 7 900 emplois au maximum et pendant un à deux ans seulement.
En plus, ce chantier aura lieu dans une région avec peu de chômage et où les entreprises ont déjà des difficultés pour recruter.
À 3 km du site nucléaire du Bugey, il y a le Parc Industriel de la Plaine de l’Ain (PIPA) qui accueille, fin 2024, 193 entreprises et un peu plus de 7 800 emplois.

Ce chantier ne bénéficiera que peu à l’emploi local.
Pour plus de 70 %, il fera surtout appel à des travailleurs grands déplacés et à une main d’œuvre étrangère.

Le site désiré par EDF

Le site désiré par EDF est beaucoup plus vaste que les 150 hectares prévus au SCOT BUCOPA puisqu’à ces 150 hectares EDF ajoute 70 hectares qu’elle possède déjà sur la commune de Saint-Vulbas.
Ce sont donc 220 hectares de zones naturelles, de terres agricoles et de carrières (qui devaient être réaménagées en terres agricoles et espaces naturels).

À ces 220 hectares, vont s’ajouter environ 150 hectares pour des projets connexes :

  • des logements temporaires et pérennes ;
  • des campings (mobile-homes, camping-cars,…)
  • des hôtels et résidences hôtelières ;
  • des gîtes mobilisés (impact négatif sur le tourisme) ;
  • des parkings déportés ;
  • des infrastructures nouvelles ou des aménagements des infrastructures existantes (ronds-points, élargissements, …) dont un pont sur le Rhône, un échangeur supplémentaire sur l’autoroute (entre Leyment et Ambérieu), …
  • des zones d’activités pour les entreprises intervenant sur le chantier des EPR ;
  • des services publics ;

  

Si certains ne voient que des effets bénéfiques à ce projet, la réalité sera toute autre avec de nombreux effets connexes :

  • artificialisation des sols et diminution des terres agricoles avec fragilisation des exploitations agricoles ;
  • suppression de zones naturelles et appauvrissement de la biodiversité ;
  • augmentation du trafic routier (employés, marchandises, déblais de chantier, …) ;
  • déstabilisation du marché de l’emploi ;
  • augmentation des loyers et des coûts de l’immobilier local (rayon de 30 km au moins) ;
  • augmentation des coûts de restauration, etc.

  

Le refroidissement des EPR2

Les sites prévus pour recevoir les deux premières paires d’EPR2 sont en bord de mer à Penly et Gravelines.
Celui du Bugey sera refroidi par les eaux de fleuve Rhône et il faudra construire en plus des réacteurs des tours de refroidissement pour limiter les rejets d’eau chaude au fleuve.
Sur l’année, si les réacteurs fonctionnent à pleine puissance, il sera prélevé au Rhône environ 315 millions de mètres cubes, dont 252 millions seront restitués légèrement réchauffés et chargés d’effluents radioactifs et chimiques.
Les tours de refroidissement consommeront environ 63 millions de mètres cubes qui partiront sous forme de vapeur d’eau dans l’atmosphère.

Cette consommation très importante d’eau de 63 millions de mètres cubes est à comparer avec la consommation d’eau potable de la Métropole lyonnaise : 77 millions de mètres cubes en 2022, dont 95 % prélevés 20 km en aval du site du Bugey dans la nappe du Rhône.

Avec un fleuve qui va avoir de moins en moins de débit suite au réchauffement climatique, l’eau va devenir une ressource rare et il va y avoir des conflits d’usages entre les besoins d’eau potable, ceux d’arrosage des terres agricoles et ceux des entreprises et des loisirs.
Dans ce contexte, ces EPR2 au Bugey ne sont pas les bienvenus.

Par ailleurs, le débit du Rhône au niveau du site du Bugey, est très dépendant de ce que les suisses laisseront s’écouler du lac Léman, lorsque le fleuve sera en étiage critique.

Pour les tours de refroidissement, il s’agirait pour chaque réacteur d’une tour de 205 m de haut, à comparer aux tours existantes qui ne font que 127 m de haut.
L’impact paysager va être énorme. Une variante est proposée pour le réduire un peu avec pour chaque réacteur des tours de 165 m de haut.

 

Modélisations des futurs EPR2 au Bugey

L’association Sortir Du Nucléaire Bugey a réalisé des modélisations en trois dimensions des futurs EPR2 prévu au Bugey.

Vue depuis le rond-point à la sortie de Loyettes (01) direction Saint Vulbas (01) :

  

Vue depuis le rond-point de Vernas (38) :

Vue depuis le site archéologique de Larina qui domine de 200 m le cours du Rhône :

Remarque :
Ces modélisations sont présentées en vue réelle telle que les humains percevront ces futurs réacteurs EPR2.
Elles sont aussi faites à hauteur du sol.
Dans son dossier pour le débat public, EDF ne présente que des vues aériennes avec un grand angle, ce qui minimise l’impact paysager du projet et atténue notablement la grandeur des tours de refroidissement.

 

Réacteurs EPR2 : peu de carbone mais des pollutions et des déchets

S’il est vrai que les réacteurs nucléaires ne contribuent que peu aux émissions de gaz carbonique, il ne sont pas pour autant sans impacts importants sur l’environnement.

Comme toute centrale nucléaire les deux EPR2, en fonctionnement normal, rejetteront régulièrement des éléments radioactifs liquides et gazeux et des produits chimiques. Ces rejets polluants seront autorisés dans la limite de la réglementation, mais ils resteront une pollution de l’environnement.

Leurs stations de pompage dans le Rhône provoqueront aussi la mort de plusieurs milliers de petits poissons juvéniles et autres faune aquatique, comme les réacteurs actuels (11 520 poissons juvéniles tués entre le 22 avril 2014 et le 22 septembre 2014 pour les réacteurs Bugey 2 et 3).

Ces réacteurs nucléaires seront aussi à l’origine de pollutions accidentelles (rejets plus importants que ceux autorisés) et ils vont produire de nombreux déchets radioactifs à faible activité, moyenne activité et haute activité, ces derniers n’ayant pas encore de solution pour leur stockage définitif pendant des milliers d’années.

Il y aura aussi des risques lors du transport de ces déchets.

Transport de combustibles usés irradiés en gare d’Ambérieu en Bugey

Comme tous les réacteurs nucléaires, ces EPR2 auront des incidents plus ou moins graves.
Une cascade d’incidents qui pourrait mal tourner et provoquer un accident grave avec libération de radioactivité dans l’environnement.
D’autres accidents sont possibles pour causes internes ou externes :
   • rupture de barrages (Vouglans, Génissiat,…) ;
   • inondation catastrophique ;
   • très gros tremblement de terre ;
   • terrorisme, guerre…

Une particularité du site nucléaire du Bugey est sa proximité de l’aéroport international de Lyon Saint-Exupéry et de l’aéroport d’affaire de Lyon Bron.
Chaque jour, le site est survolé à basse altitude (1 000 à 2 000 m) par de très gros avions commerciaux en phase d’atterrissage ou de décollage de l’aéroport de Lyon Saint Exupéry.
Bien que plus solide que celle des réacteurs actuels, la coque de protection des EPR2 ne résisterait probablement pas à la chute d’un de ces très gros avions.

Survol à 1 214 m du site du Bugey par un Airbus A319

Un accident type Tchernobyl ou Fukushima au Bugey serait catastrophique pour la France.
Le site est à 30 km du centre de Lyon et des millions d’habitants de l’Ain, de l’Isère et de la métropole lyonnaise devraient être évacués définitivement.
Les axes de transit (voies ferrées, autoroutes, …) entre le nord et le sud seraient coupés.

Simulation d’un accident grave sur un des réacteurs actuels du Bugey

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